vendredi 10 juillet 2020

L'Honnête homme Professeur, deuxième partie




Après avoir vu les conditions dans lesquelles l’Honnête homme   Professeur doit exercer, nous examinerons, s’il est professeur des écoles, ce qu’il doit enseigner à ses élèves, en plus de leur apprendre à lire, écrire et compter. L’instruction civique, ainsi le goût et la vertu du travail.

L’instruction civique
L’enfant doit apprendre quelles doivent être les règles de vie en société et les droits et devoirs du citoyen. Le Professeur est souvent la seule personne adulte à pouvoir le faire car les parents sont trop souvent défaillants, par laxisme, par négligence ou tout simplement par manque de temps. Des enquêtes d’opinion ont montré que nos compatriotes étaient favorables à ce que les professeurs se substituent à eux dans ce domaine.

En priorité, le Professeur doit apprendre à l’élève deux notions fondamentales : la liberté avec sa contrepartie la responsabilité et la solidarité et l’indispensable réciprocité.

Liberté et responsabilité
Le Professeur pourrait prendre, par exemple, pour illustrer ces deux concepts complémentaires et indissociables, le comportement de l’automobiliste sur la route avec l’usage qu’il fait de ses feux clignotants sachant que moins de la moitié des français s’en servent. Tout automobiliste est libre de doubler un autre véhicule en respectant le code de la route, mais en individu responsable il doit en avertir les autres automobilistes qui viennent en face et ceux qui le suivent. Si j’étais Professeur des écoles, je demanderais à chaque élève de ma classe de relever, quand il se déplace avec ses parents, le nombre d’automobilistes qui ne se servent pas de leurs clignotants, puis de calculer le pourcentage qu’ils représentent. Le jeu pourrait être rendu un peu plus compliqué en distinguant l’usage du clignotant gauche pour le dépassement et le droit quand notamment le véhicule se rabat. Ce qui consisterait en plus un excellent exercice de calcul mental, beaucoup trop négligé dans notre enseignement et qui pourtant peut être fort utile dans la vie. Aujourd’hui l’exemple du port du masque pourrait être pris avec la liberté de l’utiliser dans les lieux publics et la responsabilité vis-à-vis des autres quand il ne l’est pas. Peut être que ceux qui refusent de porter un masque en ce mois de Juillet 2020 sont les mêmes qui n’utilisent pas leurs feux clignotants.

Solidarité et réciprocité.
La solidarité.  Il faut apprendre très tôt à l’enfant son sens profond. A ceux qui composent la devise de notre République et que nous trouvons sur le fronton de nos mairies : "Liberté,Egalité, Fraternité"  il faudrait ajouter celui de Solidarité, qui sous-entend celui de fraternité, mais qui est plus précis et surtout plus réaliste, voire le remplacer. En effet avant de nous aimer comme des frères- c’est parfois difficile et pas forcément indispensable- commençons à être solidaire les uns envers les autres. Cette solidarité est aujourd’hui plus passive qu’active puisqu’elle s’exerce essentiellement par l’intermédiaire de l’ ETAT et de ses différentes institutions. Quand un enfant achète avec ses économies un CD, il ignore que sur la somme qu’il paye, il donne 15% à l’ ETAT (TVA) qui serviront à payer son Professeur ou le gardien de la paix qu’il voit chaque matin régler la circulation devant son école. Cette solidarité est indolore et elle a ses limites. Dans une société socialement très développée comme la nôtre, où l’individu est parfois trop assisté, l’enfant doit se poser régulièrement la question : que puis-je faire pour les autres plutôt que :  que puis-je obtenir des autres, les parents, la famille, la Collectivité.
La réciprocité. Cette notion fondamentale des relations humaines n’est pas enseignée à l’école et nulle part d’ailleurs. Quand nous donnons à quelqu’un, que ce soit de l’argent, du temps, de l’attention ou de l’amour, nous le rendons débiteur, nous l’obligeons. S’il ne peut pas nous rembourser, s’acquitter de la dette qu’il a contractée envers nous, il peut nous en vouloir. Ce qui peut paraître à première vue paradoxal. Et pourtant :  Il y a des services si grands qu’on ne peut les payer que par l’ingratitude disait Alexandre Dumas. Et même, la haine paraît quand la reconnaissance devient insupportable ajoutait Georges Bernanos.
En vérité, « Les bienfaits ne sont agréables que tant que l’on peut s’en acquitter » disait Tacite cité par André Gide dans "les faux monnayeurs".
Traduit pour un enfant de 10 ans, il doit retenir qu’il doit être reconnaissant des bienfaits dont il bénéficie de la part, surtout à son âge, de ses parents. Plus tard, d’autres adultes. Sa reconnaissance doit se manifester à leur égard de différentes façons. Le Professeur pourrait en classe demander à ses élèves de les énumérer.

Nous reviendrons plus tard dans le chapitre l’Honnête homme et les autres, cette notion de réciprocité en soulignant notamment le devoir de donner à quelqu’un que l’on a obligé la possibilité de s’acquitter de sa dette.

Enseigner le goût et la vertu du travail.
Le Professeur doit enseigner à ses élèves ce qu’est le travail, à quoi il sert et l’amour du travail bien fait, haute valeur morale comme l’affirme le philosophe André Comte-Sponville.  Cet amour du travail bien fait doit être l’apanage de toute Honnête homme quelle que soit sa profession.

Le Professeur devra leur expliquer qu’une fois terminées leurs études, ils devront rechercher un travail, non pas uniquement dans le but de gagner leur vie, mais pour y rechercher le bien être qu’est l’accomplissement de soi.
 
Il faut que le Professeur participe par son discours et par ses actes à la réhabilitation du travail manuel.  A ce titre, il doit vanter aux yeux de l’enfant la formation en apprentissage et celle en alternance qui enfin se développe dans notre pays.

Le Professeur doit savoir, et surtout en être persuadé, comme l’ont montré des études que le QI d’un enfant augmente au fil des années et que cette évolution n’est pas linéaire et varie selon les individus, ce qui signifie qu’un cancre considéré comme tel à un moment donné de son cursus scolaire peut très bien réussir sa vie professionnelle à condition d’exercer plus tard une activité qui lui plaise où il pourra développer ses talents et bien sûr en travaillant beaucoup. Ce qui nécessite une bonne orientation, ce qui hélas pas toujours le cas.
Le Professeur ne doit donc jamais dire à ses parents que leur enfant est un bon à rien. Combien d’hommes et de femmes ont souffert d’avoir été condamnés sans appel quand ils étaient jeunes pour ne pas avoir été alors dans la norme.

Prochain chapitre : Troisième partie  Suite et fin.

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