dimanche 17 novembre 2019

L'Honnête homme et le travail


CHAPITRE 1

Nous retiendrons la définition du travail par le dictionnaire Robert : activité humaine organisée et coordonnée en vue de produire ce qui est utile. Ce qui fait dire au philosophe ALAIN : le travail utile est par lui-même un plaisir et à Albert CAMUS : il n’est pas de punition plus terrible que le travail inutile et sans espoir.  

Pour tout homme, le travail est indispensable pour percevoir des revenus nécessaires à la couverture de ses besoins et pour occuper son temps, car comme l’a écrit BAUDELAIRE, : A chaque minute nous sommes écrasés par l’idée du temps et pour échapper à ce cauchemar il n’y a que le plaisir et le travail, mais le premier nous use alors que le second nous fortifie.  

Pour l’Honnête homme, il lui nécessaire aussi de :
-Se réaliser pleinement, et pour faire savoir aux autres ce que nous sommes à travers ce que nous faisons, dit Samuel ROUVILLOIS, frère de la Communauté Saint Jean qui ajoute : On ne devient pas humain sans passer par l’expérience personnelle du travail.
-D’avoir un travail utile économiquement et si possible socialement.
-Enfin, que l’activité de l’ entreprise dont il fait partie  soit conforme à ses exigences morales.

Activités utiles économiquement

Nous passerons rapidement sur toutes les activités qui ne sont d’aucune utilité comme celle d’intermédiaires parasites de la société dans lesquelles l’Honnête homme ne saurait se fourvoyer pas plus qu’il ne saurait, cela va de soi, être un prébendier ou bénéficier de sinécures. Par contre nous devons nous arrêter un instant sur celles dont l’utilité est en partie ou totalement discutable et celles dont l’efficacité est insuffisante.
Activités dont l’utilité est en partie ou totalement discutable.
Nous prendrons deux exemples dans le domaine de la Santé, mon domaine de prédilection, et un dans celui de la Recherche. Deux domaines choisis volontairement parce qu’on peut raisonnablement penser que leur intérêt économique et social va de soi.
-Domaine de la Santé
La fabrication et de la vente de produits aux vertus soi-disant thérapeutiques dont l’action est inefficace et la réalisation d’actes médicaux et paramédicaux inutiles qui peuvent ne pas être sans risques pour les malades et obèrent le budget de la Sécurité Sociale. Les actes inutiles à l’hôpital pourraient s’élever jusqu’à 30% selon certains experts.
-Domaine de la Recherche.
Des études réalisées par des enseignants chercheurs financées par l’Etat et qui ne font pas sérieusement progresser nos connaissances comme celle qui conclut doctement que le sourire d’une femme invite au contact : il suscite 7.02 regards en moyenne alors qu’un visage fermé ne provoque que 2.01 coups d’œil. Autre découverte du même chercheur : les hommes prendront d’autant plus une autostoppeuse que sa poitrine est généreuse…
Activités dont l’efficacité est insuffisante.
Elles sont très nombreuses. Nous ne prendrons que deux exemples.
Celui des mauvaises gestionnaires d’entreprises privées et d’administrations publiques, à commencer par les patrons qui par négligence et/ou incompétence ruinent la leur et parfois celle de leurs fournisseurs, sans parler des salariés restés sur le carreau.
Celui des cadres dans les grandes entreprises, mais aussi des employés dans les Administrations qui ne se sentent pas engagés dans leur travail, sont démotivés et dont l’efficacité évidemment en pâtit. Nous reviendrons sur la réalisation personnelle dans le travail dans un prochain chapitre.

Activités utiles socialement

Pour mesurer l’activité d’un point de vue social, il faut tenir compte de l’impact sur l’environnement selon qu’elle le dégrade ou pas et les effets positifs ou négatifs sur le bien être des individus et de la Collectivité. Ainsi, les personnes chargées de l’entretien et du recyclage des déchets ont une utilité sociale bien supérieure à un cadre de banque ou de publicité. Les premières créent une plus-value 10 fois supérieure à ce qu’ils coutent tandis que les seconds détruisent dix fois ce qu’ils créent. *
Nous voyons apparaître déjà une contradiction possible entre la recherche de la meilleure rémunération possible et l’intérêt économique et sociale de l’activité qui l’assure.
L’Honnête homme privilégiera toujours l’intérêt économique et social, c’est à dire qu’il optera chaque fois qu’il le pourra pour un salaire moins élevé pour un travail plus utile. Ce qui peut exiger beaucoup d’efforts, voire de sacrifices. Pour accepter des revenus moindres, il aura su ne pas augmenter inconsidérément ses besoins. Nous pensons à un ancien candidat à l’élection présidentielle qui s’est fait construire un superbe manoir et qui pour le financer n’a pas hésité à percevoir des sommes indues par l’intermédiaire de son épouse et pour lesquelles il devra rendre bientôt compte devant les tribunaux.   
Comme en préambule, j’ai bien précisé que l’Honnête homme était aussi bien une femme qu’un homme, il est aussi bien employé que cadre supérieur, ouvrier que professeur de Faculté. Un ouvrier, en charge d’une famille, qui effectue des tâches inutiles et sans intérêt dans un service Entretien aux effectifs pléthoriques d’une Collectivité locale devra avoir beaucoup de courage, voire d’inconscience, pour rechercher un autre emploi plus utile à la société, surtout s’il est installé dans une petite agglomération où le chômage est élevé.
Par contre, nombreux sont ceux chez les cadres supérieurs (je recouvre sous ce vocable tous les hommes et femmes ayant fait des études supérieures) qui ont la possibilité de changer d’emploi, voire de métier, quitte à voir leurs revenus diminuer sensiblement. J’ai à l’esprit un couple, le mari cadre dans l’industrie pharmaceutique, l’épouse journaliste qui ont décidé de quitter Paris pour s’installer en Province, lui comme médecin responsable de malades hospitalisés à domicile et souvent en fin de vie, elle comme enseignante dans un collège. Bien entendu, ils ont opté aussi pour une meilleure qualité de vie, celle en Province étant généralement plus agréable que celle dans la Capitale, mais surtout ils ont réalisé ce qu’ils souhaitaient, à savoir être au service des autres, les malades et les enfants.

Activités conformes à ses exigences morales

L’entreprise peut avoir des pratiques délictueuses comme le recours au travail au noir, la fraude en matière fiscale…la liste est longue. 

Chacun d’entre nous doit se poser, au moins une fois dans sa vie, la question : A quoi sert réellement mon travail ? Et si la réponse n’est pas satisfaisante, s’en poser une seconde : Comment puis-je faire pour en changer ?
Mais il devra aussi s’en poser d’autres que nous verrons dans les prochains chapitres.

*Le responsable d’une mission d’évaluation de la NEF, la New Economic Foundation, Eleis Lawlor conclut ainsi son rapport :
Les professions qui créent le plus de bénéfices pour la société devraient être récompensées et si c’était le cas beaucoup plus de personnes s’orienteraient vers elles, ce qui aurait pour conséquence une amélioration très sensible de la qualité de vie, surtout des plus faibles.