vendredi 19 avril 2024

A la découverte de l'Amérique. Suite

 

Le lendemain de notre week-end à New York, toujours accompagnés par notre guide interprète, nous prenons l’avion à l’aéroport de Newark pour Memphis, la ville d’Elvis Presley dans le Tennessee. Durant le trajet, j’ai une pensée affectueuse pour le cousin de mon père, Brother Albertus, frère du Sacré Cœur, né à Boussoulet dans la Haute Loire, près de Saint-Julien-Chapteuil, le pays de Jules Romain.  Il avait fondé au début du siècle la Mac Gill Institute et nous avait rendu deux fois visite à dix ans d’intervalle. Si j’avais été seulement en voyage d’agrément, je serais allé découvrir l’établissement et sa bibliothèque dont il s’était occupé à la fin de sa vie et voir si le plan de verveine que ma mère lui avait donné et qui avait bien pris, nous avait-il écrit, existait encore et avait prospéré.

Nous sommes invités, sur la recommandation de mon client, le docteur Causse à Béziers, par le Professeur Shae, spécialiste comme lui de l’oreille interne, et propriétaire d’une doctor’s clinic, une clinique où les malades sont traités exclusivement en ambulatoire. En France, la chirurgie ambulatoire n’existe pas encore. Ce n’est que quelques années plus tard que mon client et ami, le docteur Philippe Marichez  commencera à la développer à la clinique Sainte Marie de Pontoise.

La clinique jouxte un hôtel classique où les patients et leur famille, qui viennent parfois de loin, peuvent séjourner. Nous sommes chaleureusement accueillis par le Professeur Shae et sa charmante épouse qui exploite une entreprise de décoration et d’aménagement intérieur. Néanmoins, à notre grande surprise, nos invités manifestent leur mécontentement. Cela fait 5 jours que nous sommes arrivés aux Etats Unis et nous n’avons pas encore visité un seul bloc opératoire, disent-t-ils. J’en fais part à mon hôte qui organise sur le champ une visite de celui de l’hôpital Saint-Francis situé en face de sa clinique sur l’autre rive du Mississipi où il hospitalise ses malades lourds qui nécessitent une hospitalisation classique. Je n’ai pas organisé ce voyage pour faire visiter des blocs opératoires pas différents des nôtres, mais pour découvrir l’organisation hospitalière précurseur de la nôtre. Pendant que mes invités font, enfin, leur visite et ravis, se font photographier au milieu des nurses, je m’entretiens avec le directeur au milieu de ses ordinateurs sur la facturation des malades selon leur pathologie. Facturation qui n’interviendra en France qu’en 2005.

Nous quittons Memphis le soir même pour nous envoler vers Houston où nous devons visiter deux non profit-hospitals, le Methodist Hospital et le Saint Luke’s Hospital.

Je précise que la moitié de nos invités sont directeurs ou administrateurs d’établissements à but non lucratif.  J’avais été étonné de l’importance de ce type d’organisation aux Etats Unis quand j’avais appris que de nombreux étudiants à la sortie d’Harvard entraient dans des non- profits organisations et c’est pourquoi j’avais pensé qu’une telle visite serait utile. Au Methodist Hospital, nous sommes royalement reçus, une voiture avec chauffeur et une jeune femme parlant le français viennent nous chercher, ma femme et moi. Nos invités nous suivant dans le car que nous avons loué. Le Methodist Hospital  comporte 10 établissements dans le Texas. Après avoir visité les installations, nous rencontrons son Conseil d’Administration au grand complet et nous sommes, là aussi, invités à déjeuner. Notre repas sera écourté par une sirène d’alarme incendie qui nous obligera à quitter assez rapidement les lieux.

Nous nous sommes demandés après réflexion si le déclenchement de la sirène n’était pas un moyen habituel de limiter la durée de présence des visiteurs.

Nous avons ensuite visité Le Saint Luke’s Hospital grâce à l’entremise du Professeur Alain Sisteron, chirurgien cardiovasculaire à l’Infirmerie Protestante de Lyon, qui y avait fait plusieurs stages. Cet établissement est en pointe en matière de chirurgie cardiaque et cardiovasculaire  et c’est pour cela qu’il m’avait conseillé de le visiter. Comme un de ses confrères nous faisait un  exposé sur les transplantations cardiaques qu’il pratiquait, je me suis aperçu que notre guide interprète, professeur de français de son métier n’était pas capable de traduire correctement les propos du chirurgien. Heureusement qu’un de nos invités, avait pu, au pied levé, la remplacer.  Je m’étais déjà rendu compte des limites de nos guides interprètes dans la maitrise des termes techniques à Memphis quand le responsable administratif de la clinique avait voulu nous expliquer les outils de gestion qu’il utilisait sur ordinateur.

Quand nous nous sommes rendus à la salle de conférence, quelle ne fut pas notre surprise de voir à travers une vitre un veau sur pied. L’hôpital ayant son propre Centre de recherches intégré. Nous avons découvert aussi  une hospitalisation haut de gamme avec des chambres et un service digne d’un 5 étoiles.

Nous ne nous sommes permis qu’un seul moment de détente en parcourant les allées d’une galerie marchande où des médecins avaient visser leurs plaques, comme de simples commerçants, mais ce qui nous a surpris, c’était de voir plusieurs vendeuses noires dont seule la couleur de leur peau les distinguait des femmes blanches.

Au retour, nous avons voulu dîner à Houston avant de prendre l’avion, mais dans le vol Mexico-Houston- Paris, il nous fut servi un excellent repas par la compagnie Air France, ce qui n’était pas recommandé pour le long voyage  que nous entreprenions.

Au terme de ce voyage, certains lecteurs pourront penser que j’ai eu raison trop tôt pour en tirer des enseignements dans l’organisation hospitalière comme la facturation à la pathologie ou la chirurgie ambulatoire qui verront plus tard le jour en France, mais je pense qu’il vaut mieux avoir raison trop tôt que trop tard. Personnellement j’ai retenu des enseignements sur la pratique du marketing hospitalier et dès mon retour j’ai lancé des formations sur ce thème avec la collaboration de Jean-Paul Flippo, professeur de marketing à l’EM Lyon.

Quand débarqués à Roissy, nous nous sommes quittés, un seul de mes  invités sur les 14 m’a remercié. Les autres ont dû penser, je l’ai supposé, que mon épouse et moi en avions profité pour voyager gratuitement à leurs frais, si j’ose dire, ce qui n’était pas le cas, bien entendu, et  ce qu’ils auraient peut-être fait s’ils avaient été  à notre place...  Dommage que ce beau voyage, que je ne regrette pas d’avoir organisé et entrepris, se soit  terminé sur cette fausse note révélant l’ingratitude humaine, mais je l’ai heureusement vite oubliée. Je ne m’en suis souvenu qu’en écrivant ces lignes.       

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