vendredi 14 janvier 2022

Pourquoi à une époque j'ai fréquenté Valery Giscard d'Estaing

 

Nous sommes à la fin des années 60. Un ami architecte avec qui j’ai réalisé ma première clinique : La Polyclinique des Minguettes à Vénissieux, une des premières conventionnées avec la Sécurité Sociale, me présente Michel Gillibert.

Celui-ci a le projet ambitieux de couvrir la France de drugstores, comme celui qui existe alors à Saint Germain des Prés. Une société est créée : La SIATLI, société pour le développement international du tourisme et des loisirs, dont je deviens le directeur financier.

Michel Gillibert a comme mentor Philippe Malaud, originaire comme lui de Saône et Loire. Ce dernier est le directeur de cabinet du Ministre des Affaires étrangères, Maurice Couve de Murville. Il participera ensuite à plusieurs gouvernements comme Secrétaire d’Etat chargé de la Fonction Publique et Michel Gillibert sera nommé plus tard secrétaire d’Etat aux handicapés par François Mitterand après qu’à la suite d’un crash d’hélicoptère, il soit devenu handicapé à vie.

Philippe Malaud milite chez les Républicains Indépendants de Valéry Giscard d’Estaing et il m’invite à le rejoindre au moment où ce dernier crée les Clubs Perspectives et Réalités. J’accepte et je deviens Président du Club du département de la Loire.

Pour son fondateur ; le réseau des Clubs Perspectives et Réalités doit lui permettre d’ouvrir sa démarche à la société civile et lui servir à la fois de think-tank et de « vivier » de futurs cadres de son parti.

Pourquoi ai-je accepté ? Je me pose la question en écrivant ces lignes. Tout d’abord, j’ai voulu faire plaisir à Philippe Malaud avec qui j’avais d’excellents rapports et qui comptait sur moi pour bien conseiller son poulain Michel Gillibert dans son entreprise. Puis parce que les idées libérales, européennes et sociales de Giscard d’Estaing, alors ministre des finances, me séduisaient, idées qu’il exprimera plus tard dans Démocratie Française.  

Nous nous réunissons les samedi matin à Paris Boulevard Saint Germain sous la houlette bienveillante et débonnaire de Michel Poniatowski, Président national des Clubs. Souvent, Giscard d’Estaing est présent. Je découvre alors avec étonnement, à Paris, la connivence des journalistes avec les responsables politiques et sur le terrain, à Saint-Etienne, les querelles intestines d’une famille politique. Bien que non encarté aux Républicains Indépendants, les responsables de ce parti voient d’un mauvais œil mon intrusion involontaire dans la politique locale et ils ne s’en cachent pas. Ils interviendront même auprès de Michel Durafour, le maire de Saint-Etienne pour le dissuader de m’appeler à ses côtés. Ce qui ne m’empêchera pas de publier en 1972 un essai intitulé La Loire en Péril qui connaitra un certain succès, tout au moins régional.

Je déciderai d’abandonner les Clubs Perspectives et Réalités après qu’il ait été question de s’allier à l’Opus Dei en Espagne après avoir tissé des liens avec les jeunes conservateurs de Grande Bretagne que j’ignorais. Je connaissais mal l’Opus Dei, mais je savais que c’était une organisation cléricale de droite extrême pour ne pas dire d’extrême droite et cela suffisait pour ne plus me sentir à l’aise chez les giscardiens. Je ne savais pas encore qu’elle finançait des partis politiques de manière occulte et qu’en Espagne, sous Franco, elle avait empêché l’avènement des droits sociaux et de la démocratie.

Aujourd’hui, l’Opus Dei est derrière le mouvement Sens Commun par l’intermédiaire du Renouveau Charismatique qui a soutenu François Fillon lors des dernières élections présidentielles et qui soutient sûrement Valérie Pécresse, à moins que ce ne soit Eric Zemmour.  

Tout comme, quelques années plus tôt, j’abandonnerai la Démocratie Chrétienne fondée par Georges Bidault quand il s’opposera au Général De Gaulle, et soutenu par des extrémistes de droite, me proposera d’aller former les officiers SAS en Algérie alors que nous sommes en pleine guerre.

Chaque fois, je me suis éloigné, presque instinctivement, de la droite extrême et je m’en suis toujours félicité.

La différence aujourd’hui avec l’époque où j’ai fréquenté Giscard d’Estaing, c’est que l’extrême droite ne comptait alors que 5% du corps électoral et ne représentait pas un danger aussi grand.

En 1974 et 1981, j’ai voté pour Valéry Giscard d’Estaing sans hésiter. Il était un authentique réformateur, mais obligé de gouverner avec une droite qui lui était en partie hostile - le RPR de l’époque avait tout fait pour qu’il soit battu- il n’a pas pu accomplir son œuvre. Ce fut dommage pour lui et surtout pour la France.

 

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