Le journaliste s’il est Honnête
homme, outre qu’il doit respecter, bien entendu la charte d'éthique professionnelle des
journalistes ci-dessous, doit obéir à un certain nombre de commandements.
1/ Avoir une conscience aigüe de
sa responsabilité.
Vis-à-vis de ses lecteurs ou
auditeurs. Il exerce un beau et noble métier, indispensable au fonctionnement de
la démocratie, mais il est détenteur d’un pouvoir sans réel contrepouvoir le
plus souvent, jouissant d’une liberté presque totale. Il a par exemple le
pouvoir d’interroger les hommes et femmes politiques, non pas sur les sujets
dont ceux-ci voudraient parler, mais sur ce qu’ils
souhaitent, eux. Le pouvoir aussi de
publier une phrase parmi les milliers de phrases prononcées par un candidat en
campagne électorale. Comme l’analyse fort bien Milan KUNDERA dans l’Immortalité.*
« Le droit du journaliste ne se fonde pas sur le droit de poser une
question, mais sur le droit d’exiger une réponse ».
La liberté ne va pas sans
responsabilité, il ne doit jamais l’oublier.
2/ Ne
jamais confondre son métier de journaliste avec celui de propagandiste.
Sinon ce n’est pas un journaliste. Je parle là de certains journalistes
politiques.
3/ Ne
pas fausser volontairement ou non l’appréciation et le jugement de celui qui le
lit ou l’écoute.
Volontairement
Il doit employer
le conditionnel chaque fois qu’il n’a pas pu complétement
vérifier une information. C’est le principe de base du métier.
Involontairement
Pour
cela, il doit :
-accepter
de faire corriger par la personne interviewée son article quand il s’agit d’un
sujet technique.
Par
fierté ou par manque de conscience professionnelle, des journalistes, certains
journalistes s’y refusent. J’en ai été victime plusieurs fois, après avoir été
interviewé sur des sujets très techniques comme le financement des hôpitaux.
-refuser
que son rédacteur en chef, à moins qu’il ne le soit lui-même, veuille lui
imposer un titre à son article, s’il le juge trop réducteur ou tendancieux. Il est certes très difficile dans le milieu de
la Presse où il y a de très nombreux organes se livrant une concurrence
acharnée, de vendre son journal et pour cela d’attirer l’attention et l’intérêt
du lecteur, de l’auditeur ou du téléspectateur.
4/ Séparer
l’exposé des faits, de l’analyse et des commentaires, voire des
recommandations aux lecteurs ou auditeurs, c’est ce que j’ai essayé de faire pendant
dix ans comme directeur d’une revue de management La lettre d’IFRHOS.
5/ Maîtriser son vocabulaire et constamment l’améliorer
afin que son expression soit la plus juste possible.
Ce qui
peut paraitre évident et ne l’est pas. Trouver chaque fois le juste adjectif
qui convient.
6/
Eviter l’erreur de jugement
Qui
consiste à rechercher parfois inconsciemment des éléments de preuve qui renforce
notre point de vue et passons sous silence des informations qui le contredisent.
Comme j’en ai parlé dans mon Blog du samedi 23 Mai. Quand les médecins
disent parfois n’importe quoi.. Aucun d’entre nous, moi le premier, n’est à
l’abri de cette erreur.
7/Abandonner
toute prévention envers les entreprises dont le traitement médiatique en
France est trop négatif par rapport à ce qu’il est dans d’autres pays et qui nuit à
leur développement.
8/Eviter
de faire court à la radio ou à la télévision quand il s’agit de traiter de
problèmes complexes qui demandent parfois de longs développements.
J’en ai
fait une amère expérience. Une équipe de télévision m’avait interviewé en plein
jardin du Luxembourg pour me demander mon avis sur l’Hôpital et seulement en
quelques minutes chrono. Si j’avais
voulu plaire au journaliste qui m’interrogeait tandis que son collègue photographe
me filmait tout en chassant les pigeons qui perturbaient son champ de vision,
il eut suffi que j’affirme avec force qu’il fallait privatiser les hôpitaux
publics ou nationaliser les cliniques privées. J’aurais fait le buzz.
Raymond ARON se plaignait déjà que la nuance passe mal à la télévision car tout y est
noir ou blanc
9/ Respecter
le secret de l’enquête quand il y en a une et la présomption d’innocence.
Si non
on passe du journalisme d’investigation au journalisme d’incitation qui incite
les gens à proférer des accusations et cela est gravissime.
En
conclusion, les journalistes et ceux qui les emploient devraient s’interroger
sérieusement sur le manque de confiance des citoyens envers eux qui n’a d’égal
que celui qu’ils ont envers les politiciens.
Si
l’Honnête homme journaliste est dans l’impossibilité d’obéir à ces
commandements, il lui faut devenir son patron ou changer de métier et pour cela
s’en donner les moyens.
Dans l’Honnête
homme et le travail, **nous avions déjà vu qu’il ne doit pas hésiter à
changer d’entreprise, voire de métier si l’activité qu’il exerce n’est pas utile
économiquement et socialement, pas conforme à ses exigences morales et ne lui permet
pas de se réaliser en lui permettant d’exploiter ses talents. Questions, tout au moins la première, que peuvent
se poser je pense, certains journalistes de chaines d’informations en continu,
trop nombreuses dans notre pays.
Dans les
prochains articles, nous examinerons le cas de l’Honnête homme médecin
que j’ai plusieurs fois rencontré dans ma longue carrière.
.* Aux
éditions GALLIMARD
** Mes Blogs du 17 Novembre 2019 et 8 et 30
Décembre 2020
Charte
d’éthique professionnelle des journalistes
Le droit du
public à une information de qualité, complète, libre, indépendante et
pluraliste, rappelé dans la Déclaration des droits de l’homme et la
Constitution française, guide le journaliste dans l’exercice de sa mission.
Cette responsabilité vis-à-vis du citoyen prime sur toute autre.
Ces
principes et les règles éthiques ci-après engagent chaque journaliste, quelles
que soient sa fonction, sa responsabilité au sein de la chaîne éditoriale et la
forme de presse dans laquelle il exerce.
Cependant,
la responsabilité du journaliste ne peut être confondue avec celle de
l’éditeur, ni dispenser ce dernier de ses propres obligations.
Le
journalisme consiste à rechercher, vérifier, situer dans son contexte,
hiérarchiser, mettre en forme, commenter et publier une information de
qualité ; il ne peut se confondre avec la communication. Son exercice
demande du temps et des moyens, quel que soit le support. Il ne peut y avoir de
respect des règles déontologiques sans mise en œuvre des conditions d’exercice
qu’elles nécessitent.
La notion
d’urgence dans la diffusion d’une information ou d’exclusivité ne doit pas
l’emporter sur le sérieux de l’enquête et la vérification des sources.
La sécurité
matérielle et morale est la base de l’indépendance du journaliste. Elle doit
être assurée, quel que soit le contrat de travail qui le lie à l’entreprise.
L’exercice
du métier à la pige bénéficie des mêmes garanties que celles dont disposent les
journalistes mensualisés.
Le
journaliste ne peut être contraint à accomplir un acte ou exprimer une opinion
contraire à sa conviction ou sa conscience professionnelle, ni aux principes et
règles de cette charte.
Le
journaliste accomplit tous les actes de sa profession (enquête, investigations,
prise d’images et de sons, etc…) librement, a accès à toutes les sources
d’information concernant les faits qui conditionnent la vie publique et voit la
protection du secret de ses sources garantie.
C’est dans
ces conditions qu’un journaliste digne de ce nom :
• Prend la
responsabilité de toutes ses productions professionnelles, même anonymes ;
• Respecte
la dignité des personnes et la présomption d’innocence ;
• Tient
l’esprit critique, la véracité, l’exactitude, l’intégrité, l’équité,
l’impartialité, pour les piliers de l’action journalistique ; tient
l’accusation sans preuve, l’intention de nuire, l’altération des documents, la
déformation des faits, le détournement d’images, le mensonge, la manipulation,
la censure et l’autocensure, la non vérification des faits, pour les plus
graves dérives professionnelles ;
• Exerce la
plus grande vigilance avant de diffuser des informations d’où qu’elles
viennent ;
• Dispose
d’un droit de suite, qui est aussi un devoir, sur les informations qu’il
diffuse et fait en sorte de rectifier rapidement toute information diffusée qui
se révèlerait inexacte ;
• N’accepte
en matière de déontologie et d’honneur professionnel que la juridiction de ses
pairs ; répond devant la justice des délits prévus par la loi ;
• Défend la
liberté d’expression, d’opinion, de l’information, du commentaire et de la
critique ;
• Proscrit
tout moyen déloyal et vénal pour obtenir une information. Dans le cas où sa
sécurité, celle de ses sources ou la gravité des faits l’obligent à taire sa
qualité de journaliste, il prévient sa hiérarchie et en donne dès que possible
explication au public ;
• Ne touche
pas d’argent dans un service public, une institution ou une entreprise privée
où sa qualité de journaliste, ses influences, ses relations seraient
susceptibles d’être exploitées ;
• N’use pas
de la liberté de la presse dans une intention intéressée ;
• Refuse et
combat, comme contraire à son éthique professionnelle, toute confusion entre
journalisme et communication ;
• Cite les
confrères dont il utilise le travail, ne commet aucun plagiat ;
• Ne
sollicite pas la place d’un confrère en offrant de travailler à des conditions
inférieures ;
• Garde le
secret professionnel et protège les sources de ses informations ;
• Ne confond
pas son rôle avec celui du policier ou du juge.
Déclaration
des droits de l’homme et du citoyen (article XI) : « La libre
communication des pensées et des opinions est un des droits les plus précieux
de l’Homme : tout Citoyen peut donc parler, écrire, imprimer librement,
sauf à répondre de l’abus de cette liberté, dans les cas déterminés par la Loi. »
Constitution
de la France (article 34) : « La loi fixe les règles concernant les droits civiques et les
garanties fondamentales accordées aux citoyens pour l’exercice des libertés
publiques ; la liberté, le pluralisme et l’indépendance des médias. »
Déclaration
des devoirs et des droits des journalistes (Munich, 1971) : le SNJ, qui fut à
l’initiative de la création de la Fédération Internationale des Journalistes,
en 1926 à Paris, est également l’un des inspirateurs de cette Déclaration qui
réunit l’ensemble des syndicats de journalistes au niveau européen.