La Casa dello studente. Il francesino
Durant tout mon séjour, j’ai été hébergé dans une résidence pour étudiants dont la grande majorité était des étrangers. Elle était située - je parle à l’imparfait car quand je suis retourné à Milan en 2015 lors de l’Exposition Universelle, je ne l’ai pas retrouvée – via Manzoni, proche du Centre-Ville, pas loin de la Scala.
Je partageais ma chambre avec un autre étudiant avec qui j’échangeais quelques mots en italien. Nous nous parlions peu car quand je rentrais, il était tard et j’expliquerai pourquoi, il était déjà couché et le matin c’est lui qui partait avant que je me sois levé. Un jour, ce devait être un dimanche, nous avons fait plus amplement connaissance et j’ai appris qu’il était suisse et que sa langue maternelle était, lui aussi, le français.
De nombreux résidents venaient à Milan apprendre le chant. Certains avec qui j’avais sympathisé me saluaient le matin en entonnant sur un air d’opéra « Buongiorno…caro amico.., come stai…. ! » Bonjour cher ami, comment vas-tu… J’étais surnommé « il francesino », le petit français, diminutif « vezzeggiativo », doux en français, justifié par la bonhommie de l’homme heureux que j’étais et par mes contacts avec tout le monde. J’aimais, en particulier, raconter la dernière blague italienne que je venais d’apprendre.
Il m’est arrivé de devoir jouer, parfois, l’ interprète quand des jeunes filles étrangères étaient de passage et que les amis italiens, pas du tout à l’aise dans la langue de Shakespeare, voulaient les draguer. Un jour des suédoises étaient arrivées en car avec leur réputation à l’époque de jeunes filles libérées. Un magazine avait une fois titré : « Les suédoises qui viennent sur nos plages connaitre l’amour avec des italiens ». Les amis italiens ; ils devaient être au moins quatre me demandaient de leur traduire en anglais leurs invitations et celles-ci me répondaient qu’elles étaient fatiguées par leur voyage et avaient besoin de se reposer.
La dolce vita
Nous étions un petit groupe d’amis résidents dont un péruvien très volubile auquel s’étaient jointes des jeunes filles vendeuses au rayon parfumerie de la Rinascente, le grand magasin situé à côté de la cathédrale, il Duomo, qui, lui, existe toujours. Je dois préciser que je percevais un salaire de la Compagnie d’Assurances et que j’étais donc à l’aise financièrement, plus que je ne l’étais en France. Nous nous réunissions dans des bars qui possédaient un juke-box et il nous est arrivé d’enfermer avec nous le vigile qui faisait son tour de garde. Nous dansions et chantions sur les airs des chansons italiennes, bien entendu, qui me reviennent aux lèvres à l’instant où j’écris ces mots, mais aussi de Gilbert Bécaud, alors le plus connu des chanteurs français et de Frank Sinatra. Le film « La Dolce Vita » était sorti en début d’année et les garçons se prenaient pour Marcello Mastroianni et les filles pour Anita Eckberg quand nous nous sommes un soir baignés comme eux dans une fontaine comparable à celle de Trevi à Rome où fut tourné le film.
Un jour, un ami a voulu m’emmener en voiture au lac de Come et je n’ai jamais eu autant peur de ma vie. J’ai découvert ce jour-là que les italiens conduisaient à toute vitesse, le pied au plancher sans tenir compte des autres et respecter une quelconque priorité.
Quand la fiesta è finita
Retourné en France, j’ai laissé à la frontière il dottore Mazenod. Puis j’ai repris modestement à Nice mon scooter que j’avais laissé chez un garagiste pour rentrer à la maison après deux mois enchanteurs au milieu de mes amis italiens, “des français de bonne humeur“ comme disait Cocteau. Depuis j’aime leur pays et je suis son évolution au point d’avoir écrit le 30 mai 2018 dans mon Blog avec l’arrivée de l’extrême droite au Pouvoir, « J’ai mal à l’Italie. »* Dans cet article je parle de leur langue incomparable à tout autre pour chanter, déclamer des poèmes et pour parler d’amour. La langue de la joie. Je parle aussi de leur littérature dont je possède de nombreux ouvrages dans ma bibliothèque et de leur cinéma.
· Chroniques d’une décennie 2014-2024, chapitre être modéré en France et à l’étranger pages 313 à 315
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