mardi 18 novembre 2025

Les personnes célèbres que j'ai rencontrées ou failli rencontrer suite

 Antoine Pinay

J’ai failli le rencontrer, mais le jour où j’avais prévu de le voir quand  il est venu à la Charpinière, accompagné de sa sœur qui ne le quittait pas,  je n’avais pas pu, au dernier moment, me libérer. J’aurais pourtant aimé échanger avec lui dont on m’avait rapporté que, parlant de mon livre La Loire en Péril*, il aurait dit :  “C’est Mazenod qui a raison“ d’autres responsables politiques à l’époque avaient réagi très différemment comme le Préfet de La Loire de l’époque Paul Camous  qui s’était écrié en réunion, brandissant mon livre “Ne l’achetez pas, je vous prête le mien !  “.

La dernière fois qu’il est venu à la Charpinière, peu avant sa mort, il avait plus de 90 ans, il était très diminué physiquement, mais un témoin m’a rapporté que lorsqu’ il a vu mon épouse, son regard s’était éclairé, justifiant ainsi sa réputation pour son goût prononcé pour les femmes, surtout quand elles étaient jolies. En écrivant ces lignes, je pense à la maxime de Chamfort Le châtiment de ceux qui ont beaucoup aimé les femmes, c’est de les aimer toujours“.

François de Grossouvre

Je l’ai connu à l’époque de la SIATLI dont j’ai parlé dans l’article précédent. Médecin, époux de la fille des sucres Berger, il était un ami très proche de Mitterrand et alors que ce dernier était Président de la République,  il se serait suicidé à l’Elysée ; version contestée, je crois, par sa famille. Lors d’un déjeuner chez Léon, le célèbre bouchon lyonnais, avec Philippe Malaud et Michel Gillibert, il m’avait proposé que je le rémunère sous forme de salaire mensuel pour nous faire bénéficier de ses relations avec son mentor, mais Philippe Malaud s’était alors  écrié : “Ce n’est pas nécessaire, je connais bien  François Mitterrand et l’autre jour je suis rentré avec lui dans l’avion qui nous ramenait de Bucarest“.

 Michel Noir

Je l’ai connu alors que, jeune espoir du Parti gaulliste, il venait d’être élu Maire de Lyon. Il m’avait demandé de recruter son assistant qui puisse lui apporter ses compétences pour contrôler efficacement la gestion du directeur général des Hospices Civils de Lyon dont il  présidait le Conseil d’Administration.  Ma recherche était sur le point d’aboutir avec la candidature, « high caliber » comme disent les anglo-saxons,  d’un directeur d’hôpital privé, capable de « faire le poids » face à Renaud Dutreil, connu en France pour avoir, quand il était au Ministère de la Santé, créé la carte sanitaire. Mais au moment de signer mon contrat, je m’étais déplacé pour cela à l’Hôtel de Ville, Monsieur Noir se ravisait. Il avait préféré recruter directement le directeur de l’hôpital de l’Antiquaille faisant partie des HCL, donc collaborateur de Renaud Dutreil.

Une autre fois, il avait faux bon au Président de l’Infirmerie Protestante de Lyon, Raymond Morin accompagné de son directeur et de moi-même à l’occasion d’un rendez-vous que nous avions au Ministère de la Santé. Il avait oublié qu’il avait ce jour-là un tournoi d’échecs avec l’un de ses fils. Le hasard a voulu que je le retrouve un jour dans le TGV Paris Lyon. Il était assis et moi debout. Ainsi pour une fois je  le dominais physiquement, je dois préciser qu’il était beaucoup plus grand que moi et j’ai pu lui faire part de mes regrets que nous n’ayons pas travaillé ensemble – je me suis retrouvé un jour dans son petit bureau à l’Assemblée Nationale  qu’il partageait avec Alain Devaquet, aussi grand que lui, et en leur présence, je m’étais alors vraiment sentir très gêné physiquement - Cette situation où être debout dans un train alors que votre interlocuteur est assis, je l’ai vécue une autre fois dans le TGV entre Lyon et Saint-Etienne avec Michel Thiollière ancien sénateur maire de cette dernière que j’avais connu quand il était adjoint au Maire, mais je n’avais pas de reproche à lui faire.

  Jean Auroux

Connu comme Ministre du Travail de François Mitterrand et les lois qui portent son nom, je l’ai connu comme Maire de Roanne. Un jour, nous sommes allés tous les deux à la Caisse Nationale d’Assurance Maladie défendre le dossier de la Clinique Pierre Brossolette que j’avais aidée à se réaliser. J’en parle assez longuement dans mon livre « Une vie au service de l’hospitalisation privée »**. A l’issue de la réunion, je me suis aperçu qu’un homme politique avait peu de poids face à l’Administration pas plus qu’il n’en avait face aux banques.  Notre déplacement n’avait servi à rien. Cette réunion m’en a rappelé une autre, cette fois dans les salons de la Banque Paris-Bas à Paris  avec ses dirigeants qui nous   avaient invité à dîner, Philippe Malaud, alors directeur du Cabinet de Couve de Murville, ministre des Affaires Etrangères et moi-même pour parler de la SIATLI et de notre projet de drugstores, la banque étant déjà propriétaire de celui de la rue de Berry.  A la sortie de notre réunion en descendant les escaliers – le restaurant était au dernier étage à ciel ouvert d’un immeuble  rue de l’Opéra- Philippe Malaud m’avait dit : “ Vous verrez que nous aurons droit à une boîte de chocolats“. J’ai revu un jour Jean Auroux à  la fête du livre à Saint-Etienne où il m’a dédicacé le livre qu’il venait d’écrire.

Alain Jarrot

Ministre, compagnon de la Libération, maire de Montceau les Mines. J’avais fait sa connaissance lors de la construction du Centre Médico-chirurgical de Dracy-Le-Fort pour lequel il était intervenu auprès de sa collègue Simone Veil ministre de la Santé pour obtenir l’autorisation de création de lits contestée alors par les autorités locales. Un jour que nous voyageons ensemble dans le TGV en montant à Paris, il m’avait avoué non sans une certaine fierté qu’aux Conseils des Ministres auxquels il participait , il était le seul à porter une arme si quelqu’un était venu pour les prendre en otages, il s’en serait servi.

  Daniel Mandon

Il l’a été surtout connu dans son département, la Loire. Universitaire, sociologue, Maire de Saint-Genest-Malifaux,   conseiller général et député. Nous partagions les mêmes idées bien qu’appartenant à des milieux professionnels très éloignés. Nous nous sommes rencontrés plusieurs fois, notamment au sujet de mon essai « Mérites-tu vraiment ton salaire ? » qu’il avait bien volontiers préfacé. Il n’était pas avare d’anecdotes sur la vie au Palais Bourbon chaque fois que nous nous rencontrions.

*Mon premier livre édité à compte d’auteur en 1973

**Aux éditions Ifrhos. editionsifrhos@orange.fr

 

mardi 4 novembre 2025

Les enfants trop ou mal aimés

 

J’avais déjà stigmatisé les couples  qui ne veulent pas d’enfants dans mon Blog  du 23 juin 2014 « Quand les petits chiens remplacent les enfants »* dans lequel je citais les paroles du pape François fustigeant le bien être économique :“ C’est sûr, tu peux visiter le monde, partir en vacances, avoir une maison à la campagne, être tranquille et c’est sans doute mieux, plus commode d’avoir un petit chien, deux chats » ainsi que dans celui du 17 mars 2018 « Vous ne voulez pas d’immigrés, faites donc des enfants »**.

N'avoir seulement qu’un enfant ou pire pas d’enfant du tout, c'est tout notre modèle social qui s'effondre car pour la 1ère fois depuis 1945, les décès viennent de dépasser les naissances en France.

Il y a même une accélération de la tendance depuis quelques années car l’Insee ne prévoyait ce retournement que pour 2035, donc nous sommes, hélas en avance sur le calendrier.

La France qui a longtemps fait figure d'exception dans l'Union Européenne, avec son indice de fécondité par femme supérieur, c'est fini ! Ces meilleures performances s’expliquaient en grande partie par le fait que, chez nos épouses, travailler et avoir des enfants n’étaient pas incompatibles, contrairement à leurs consoeurs  italiennes ou espagnoles.

Recul de la population active et du nombre de cotisants

"La dénatalité quand elle dure, c'est moins de bras et moins de cerveaux pour faire tourner l'économie", résume l’économiste Maxime Sbaihi. Moins d'enfants, c'est bien sûr moins d'enfants par classes et donc des écoles menacées. "On va manquer de travailleurs avant même de manquer de travail".

Ce qui signifie que moins d'actifs qui cotisent c'est donc moins de fonds perçus pour davantage de pensionnés qui vivent plus longtemps. Une équation impossible à résoudre avec les paramètres actuels.

"C'est tout notre modèle social qui s'effondre, anticipe Maxime Sbaihi. A l'après-guerre, on avait tout misé sur la démographie et notre système par répartition prenait la forme d'une pyramide. Aujourd'hui cette pyramide rétrécit en sa base à cause de la dénatalité et ne cesse de s'élargir par le haut. La solidarité intergénérationnelle pèse de plus en plus lourd.

La France se caractérise par un faible taux d'activité aux deux extrémités du spectre, pour les plus jeunes et les seniors. Il faut jouer sur les principaux paramètres qui sont l'âge d'entrée et l'âge de départ."

Une réponse facile est l'immigration comme l’assume actuellement l’Espagne, même si elle peut s'apparenter à priver des pays en développement de bras et de cerveaux et présente des risques non négligeables pour la cohésion du pays.  

Maxime Sbaihi qui a écrit « Les berceaux vides » résume: "Trois solutions. Bébé, immigration ou robots. Le Japon a choisi cette dernière voie et il faut voir dans quel état est leur économie."

Les robots sont tout de même peut-être aujourd’hui la seule solution, avec l’Intelligence Artificielle et ses algorithmes qui les crée et les anime et remplacera de nombreuses tâches qui ne nécessiteront donc plus de main d’œuvre.  Elle devra toutefois financer les pensions des retraités de plus en plus âgés, à moins que ceux-ci aient choisi le système de la capitalisation, sachant, il est vrai, que celui existant par répartition est condamné à disparaître à terme à cause du déséquilibre croissant entre actifs et retraités.

Il faut parler non seulement de l’économie et de ses futurs bouleversements, mais aussi de l’enfant unique qui n’a pas la chance de pouvoir partager avec des frères et des sœurs, qui est souvent trop choyé par ses parents, surprotégé, à qui on demande parfois beaucoup trop, à qui on ne refuse rien, à qui on n’ose pas dire non et que l’on ne prépare pas suffisamment à affronter les obstacles inévitables qui se présenteront à lui. Par ailleurs, l’enfant unique doit assurer, plus tard, seul, la responsabilité de prendre soin de ses parents lorsqu’ils sont âgés, soutien financier et/ou émotionnel.

Peut-être qu’avant de se marier, dans une sorte de contrat moral non écrit, celui ou celle qui est convaincu que fonder une famille, c’est avoir plusieurs enfants qui s’y épanouissent, sous certaines conditions, bien entendu, devrait obtenir l’accord de son ou de sa partenaire.

Cependant, certains parents ont des raisons légitimes pour ne pas avoir d’enfants ou n’en avoir qu’un seul, comme la santé de la maman  ou leur situation précaire, ou à la limite compréhensibles comme la  peur de notre avenir collectif,  il est vrai que les nuages semblent actuellement s’accumuler, et donc de celui d’un futur enfant.

*Chroniques d’une décennie, pages 85 à 86

 **Chroniques d'une décennie, page 330 à 332